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Monsieur le marquis Wallerand de Saint-Just d’Autingues a une longue habitude des prétoires et sait courtoisement répondre à côté de la question. Pas seulement parce qu’il a été l’avocat pendant quarante ans du Front national (FN) et subsidiairement celui de Brigitte Bardot, mais parce que le trésorier du parti a déjà été condamné en 2023 à six mois avec sursis et une peine d’inéligibilité de deux ans pour « recel d’abus de bien sociaux » dans l’affaire Jeanne, un montage astucieux pour financer les législatives de 2012.
Mᵉ Saint-Just, 74 ans, – qui n’a guère de liens avec le proche de Robespierre, si ce n’est qu’ils ont tous deux été élus dans l’Aisne et ont trébuché à Paris – se drape volontiers dans sa bonne foi et s’est indigné, lundi 4 novembre, au procès des assistants du Parlement européen, du moindre soupçon infamant. Il a été trésorier, bénévole, du FN à partir de 2009 et pendant douze ans, membre du bureau politique, puis du bureau exécutif, et même vice-président, et salarié du parti à partir de 2014 pour les affaires juridiques et judiciaires. Il s’est présenté depuis son adhésion au FN, en 1986, à toutes les élections, « sauf à la présidence de la République », plaisante le prévenu.
En 2016, la situation financière du FN n’est pas brillante, les charges sont passées en trois ans de 140 000 à 662 000 euros, la dette dépasse les 9,1 millions. « Nous avons surtout eu un problème de trésorerie, plaide l’avocat. En vérité, la situation du mouvement était saine et ne fera que s’améliorer. » En attendant, il faut réduire les coûts et l’accusation le soupçonne d’avoir voulu profiter de la manne européenne pour soulager les finances du parti, en embauchant des assistants fictifs.
Les indices abondent. Il n’a pas vu malice à ce que le Parlement paie une indemnité de licenciement de 21 000 euros au garde du corps de Jean-Marie Le Pen, lorsqu’il a changé de contrat d’assistant parlementaire, ni quand la dévouée secrétaire du président est devenue sur le papier assistante de Bruno Gollnisch. Il ne sait plus trop s’il avait remarqué que la directrice de cabinet de Marine Le Pen était elle aussi affectée à Strasbourg ou si Yann Maréchal, la sœur de Marine, qui s’occupait, au siège, des grandes manifestations, avait suivi le même chemin.
La présidente du tribunal lui met sous le nez un courriel qui prouve que le chauffeur de Marine Le Pen était payé comme assistant parlementaire, le vieil avocat d’abord ne s’en souvient pas, puis assure « qu’avoir conscience, ce n’est pas être complice ! » et s’insurge avec l’habitude que donne la longue fréquentation du barreau : « Un emploi fictif, en français, c’est une personne qui ne fait aucun travail, je suis assez choqué par cette déviation du langage ! »
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